Les origines de l'association

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Flaran en feu

 

Dans la nuit du 15 au 16 octobre 1970, notre chère abbaye entrait dans la rubrique des faits divers. Un incendie criminel ravageait le logis abbatial et une travée du cloître. La providentielle intervention de Monsieur Martin permit d’éviter le pire ; le feu commençait à gagner la charpente de la chapelle.

L’opinion se passionna à l’époque pour cet incendie d'origine criminelle. Trés rapidement les responsables furent identfiés : les fils de la propriétaire, les frères Rochy.

Le monument était sous le coup d’une procédure d’expropriation au profit du département et l’indemnité proposée dérisoire. L'indemnité en cas de sinistre était plus qu’intéressante.

Les gendarmes ne tardèrent pas à mettre Jean Marie Rochy en garde à vue. Ne leur avait-il pas affirmé haut et fort que, plutôt que de se voir enlever l'abbaye, il « foutrait le feu » (sic) au bien familial. Mais, ils durent déchanter et l’élargir le soir même. Il justifia en effet d’un alibi béton ; il s’avérait, après vérifications, qu’il avait passées la nuit de l’incendie en compagnie de son frère et de leur copain Dédé, dans deux restaurants et discothèques de Tarbes où le trio avait fait ostensiblement bombance. Mais le pugnace juge d’instruction Pierre Inchauspé chargea la PJ de Toulouse d’une nouvelle enquête.

Intrigués par l’agression à Flaran trois semaines avant l’incendie de Clémence Laurans, âgée de 89 ans, et de son fidèle majordome Quinto par deux inconnus, les policiers établirent qu’elle était l’œuvre de deux hommes de main issus du milieu toulousain recrutés par le propre petit-fils de la vieille dame. En fait, il s’agissait d’intimider sa grand-mère, pour mieux la persuader de quitter l’abbaye où elle ne se trouvait plus en sécurité, ce qui fut fait. Plus rien dès lors ne s’opposait à ce que l’abbaye soit incendiée sans risque de faire griller la vieille dame. Mais l’alibi tarbais me direz-vous ? Non sans mal, les limiers toulousains purent le tailler en pièces !

Jean-Marie Rochy fut contraint de leur révéler le véritable roman policier dont il avait imaginé et mis en place le scénario. Pendant que le copain Dédé, alléché par une forte prime, s’escrimait à mettre le feu aux vieilles menuiseries de l’abbaye, Jean-Marie et son frère exhibaient tranquillement son sosie dans les établissements de nuit tarbais. Cette redoutable efficacité qui amena la solution rapide de l’énigme, les policiers la puisèrent en grande partie dans le concours des informateurs et indics infiltrés dans le milieu toulousain, dans lequel le malheureux gersois avait eu l’imprudence de nouer ses funestes relations.

Un des derniers enquêteurs survivant me confiait récemment  « Ce n’est pas à la cathédrale Saint-Etienne que l’on résout les affaires criminelles »

Dominique MOULETTE.

 

Cloître incendie abbaye de Flaran
abbaye de flaran après incendie
Incendie à Flaran

Le beau cloître cistercien du XIIe siècle avant l'incendie. Et après l'incendie.

Course de vitesse pour sauver l'abbaye de Flaran (1913-1914)

 

En 1881, la famille Laurans devient par héritage propriétaire de l’ancienne abbaye de Flaran. Elle poursuit l’exploitation des terres et l’affectation des bâtiments conventuels en habitation (le logis abbatial), en chai (l’église), en entrepôt de grains et autres productions des métairies (cellules des moines, réfectoire…).

Les revenus de la terre, fin XIXe, début XXe siècle, ne sont plus ce qu’ils étaient et le propriétaire ne peut plus faire face aux réparations urgentes des vastes bâtiments dont il a la charge.

Aussi Amédée Laurans se laisse-t-il convaincre par un de ces nombreux démarcheurs d’œuvres d’art qui sillonnent le midi de la France à la recherche de sculptures romanes en particulier.

A plusieurs reprises il reçoit la visite d’un certain Leroy-Dupré habitant Paris qui possède divers pieds à terre historiques en Lot-et-Garonne ; à Nérac il détient une partie du château d’Henri IV et à Vianne une propriété « qu’il se plaît à embellir de vieilles choses intéressantes».

 

Cette bonne renommée lui ouvre les portes des demeures de qualité.

Il agit pour son propre compte et parfois (c’est le cas pour Flaran) il sert de rabatteur pour un antiquaire parisien très connu, M. de Mothe. Les pourparlers sont largement engagés en l’été 1913 entre le propriétaire d’une part et MM. Leroy-Dupré et de Mothe d’autre part. Quand les transactions deviennent officielles, en septembre, le microcosme gersois et artistique s’émeut ; il s’engage alors une course de vitesse pour éviter le dépècement de Flaran avec surenchères financières de part et d’autre.

Face aux vendeurs et acheteurs, une personnalité locale attentive à ce patrimoine, Philippe Lauzun, conservateur du patrimoine et président de la Société Archéologique du Gers.

Il va utiliser sa compétence, son réseau relationnel pour contrecarrer la vente car rien n’interdisait à Amédée Laurans de vendre ou de démolir une partie de son bien. L’ancienne abbaye de Flaran ne disposait en 1913 d’aucune protection officielle. Étrange duel entre Amédée Laurans et Philippe Lauzun, tous deux grands bourgeois, vivant de la gestion de leurs biens, gros propriétaires terriens (ils sont voisins de terres) ; ils résident tous deux à Valence et se reçoivent dans leurs « châteaux » respectifs.

 

Échec à la vente

 

Par notification du 7 septembre 1913, l’administration des Beaux-Arts informe le propriétaire de Flaran de l’ouverture d’une procédure de classement. Ne tenant aucun compte de cette annonce qui normalement « gelait » le bien pendant un délai de 3 mois, M. Amédée Laurans poursuit les négociations en vue de vendre : il traite verbalement, affirme-t-il, avec l’antiquaire parisien.

Dès connaissance de ces transactions, Philippe Lauzun intervient en haut lieu : il reçoit le soutien de M. Roujon, ancien directeur des Beaux-Arts qui presse le ministère de faire hâter le classement, et par le truchement d’un ami il est informé des transactions.

Les archives du Gers conservent une correspondance de cet ami dont certaines phrases restent sibyllines (preuve que les intervenants veulent garder l’anonymat).

Philippe Lauzun calme le jeu : par des démarches pressantes et polies il défend l’Abbaye, n’attaque pas le propriétaire qui se laisse convaincre et ne s’oppose plus au classement.

Réunis le 28 novembre 1913, les membres de la Commission des Monuments Historiques émettent un avis favorable pour un classement en urgence.

Le Président de la République, Raymond Poincaré, en résidence à Èze, peut alors signer le décret de classement le 7 avril 1914. Le président de la Société Archéologique annonce à tous ceux qui l’ont aidés la bonne nouvelle ; son acharnement a permis le classement de Flaran.

(Les documents concernant le classement de l’ancienne abbaye de Flaran, et qui ont servis pour cette étude, se trouvent dispersés : aux Archives départementales du Gers et du Lot-et-Garonne, dossiers Philippe Lauzun, dossiers archéologiques, à la mairie de Valence-sur-Baïse, à la S.A.G, aux services de l’ABF, à la Direction du Patrimoine à Paris, rue de Valois…)

Georges Courtès

Vice-Président du Conseil général du Gers - Président du Comité de Pilotage de Flaran

 

Pétition de la Société Archéologique

Pétition lettre 2 Abbaye de Flaran
Lettre pétion Abbaye de Flaran
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